En grandissant, les enfants se posent beaucoup de questions. Et naturellement, il arrive qu’ils viennent nous interroger sur la mort. Nous nous trouvons alors désemparés pour aborder ce sujet avec eux, pour répondre à leurs questions parfois très précises, parfois faisant appel aux questionnements existentiels qui nous traversent nous aussi. Alors comment s’y prendre ?


Montrez à votre enfant que c’est un sujet dont il peut parler


Même si ce sujet peut vous mettre mal à l’aise, il est important que votre enfant puisse trouver un interlocuteur de confiance avec lequel partager ses questionnements. En éludant le sujet, l’enfant pourrait être maintenu dans des idées qu’il se fait qui ne sont pas forcément justes (qu’il puisse être responsable de la mort de quelqu’un par exemple). C’est aussi l’occasion pour lui de faire l’expérience que parler peut le soulager. Et pour plus tard, lorsqu’il sera confronté à la mort d’un proche, que c’est un sujet dont on peut parler, que l’expérience de la mort d’un proche se vit aussi avec le soutien de son entourage.


Demandez-lui ce qui l’a poussé à vous poser la question


Pour les adultes, la mort, parce qu’elle évoque la mort d’un proche ou notre propre mort, peut nous faire ressentir une certaine gravité quant à ce sujet. Pour certains enfants, il s’agit juste d’échanger sur le fonctionnement du monde qu’ils sont en train de découvrir. 

L’ enfant est en effet souvent confronté de façon indirecte à la mort : à travers le décès d’un animal de compagnie ou d’une célébrité évoqué dans les médias, dans des jeux, livres ou dans des dessins animés. Ainsi, vous pourrez mieux comprendre quelle situation il a vécu, ce qu’il a pu entendre à ce sujet. Cela va vous permettre de vous adapter au mieux à son âge et à ses préoccupations. 


N’hésitez pas à lui demander ce qu’il en pense, lui


Afin de pouvoir peut-être mettre à jour certaines de ses croyances sur le sujet, pour suivre ses raisonnements et sa façon à lui de comprendre les choses. Vous pourrez aussi ainsi plus facilement adapter votre niveau de langage au sien, en reprenant ses mots à lui et en profiter pour lui expliquer certains mots qu’il aurait pu entendre sans comprendre. Il peut par exemple avoir entendu que telle personne est morte à l’hôpital, et associer forcément ce lieu à la mort plutôt qu’au soin. Parfois les enfants n’ont en fait pas de réelles questions mais un besoin d’échange sur ce sujet, une envie de partager leurs expériences. 


Utilisez des mots simples et compréhensibles par votre enfant


Les euphémismes du type « il s’est endormi », « il a disparu » « il est parti en voyage » sont à éviter parce qu’ils sèment la confusion dans l’esprit de l’enfant. Selon son âge, votre enfant peut prendre au pied de la lettre en pensant par exemple qu’on risque de mourir en dormant. Utiliser le mot « mort » permet d’éviter cela.


Parlez des émotions que cela suscite


C’est l’occasion aussi d’apprendre à votre enfant à reconnaître chez lui des émotions comme la tristesse, la peur, la curiosité et de comprendre qu’il est tout à fait normal de ressentir ce genre d’émotions. Vous pouvez lui dire à cette occasion que vous aussi il vous arrive de ressentir ces émotions. Il n’y a rien de mal à ce que votre enfant voie que vous êtes triste ou qu’il vous voie pleurer lorsqu’une personne proche meurt. Vous pouvez alors lui expliquer les émotions que vous ressentez. Par exemple, « Je pleure parce que grand-père est mort et je suis très triste de ne plus le revoir ». 

Les enfants sont souvent inquiets pour leurs parents lorsqu’ils les voient tristes. Parce qu’ils les aiment évidemment, mais aussi parce que les enfants ont besoin de leurs parents pour survivre. Ainsi, ils sont vigilants quant à la façon dont leurs parents se sentent. Rassurez-les sur vos ressources en tant qu’adulte : « Bien sûr je suis triste, mais j’ai d’autres adultes autour de moi pour me réconforter, pour me consoler ». 

Ou encore vous pouvez rappeler qu’il y a aussi des choses qui vous procurent de la joie, que vous avez des projets qui vous enthousiasment. Il arrive aussi que des enfants s’en veuillent de ne pas avoir pleuré au décès d’une personne proche. Vous pouvez leur rappeler que chacun ressent et exprime ses émotions à sa façon : certaines personnes pleurent, d’autres pas forcément.


Parlez de vos croyances si vous en avez


Ce qui se passe après la mort est un mystère. Et vous pouvez dire cela à votre enfant. Cela peut être l’occasion de parler avec lui de la façon dont vous, vous imaginez les choses et de faire le lien avec vos croyances personnelles ou spirituelles. Vous pouvez aussi parler des croyances des autres personnes, et même faire participer à la conversation une personne de l’entourage de l’enfant.


C’est normal de ne pas avoir réponse à toutes ses questions !


Parfois vous n’aurez pas de réponse à apporter à votre enfant, soit parce qu’il n’y en a tout simplement pas, soit parce qu’il faut aller la chercher. Vous pouvez accompagner votre enfant dans la recherche de réponses adaptées à son âge, en allant par exemple avec lui à la bibliothèque chercher des livres pour enfants abordant ce sujet.

Voici quelques exemples de questions 

# C’est quoi mourir ?
Les enfants plus jeunes ne savent peut-être pas ce que signifie la mort. Vous pouvez leur dire par exemple, « mourir signifie que le corps de Papi Jean ne fonctionne plus, il ne peut plus bouger, ni te faire de câlin » ou encore parler du cœur qui s’arrête de battre, du fait qu’on ne respire plus. Vous pouvez aussi aborder l’aspect irréversible de la mort « C’est pour toujours ».  

# Pourquoi sont-ils morts ?
Votre enfant essaie de donner un sens à la mort. Il voudra peut-être savoir ce qui a causé le décès, alors essayez de répondre à la question en fonction de son âge et de son niveau de compréhension. Par exemple, « le cœur de mamie était très vieux et ne fonctionnait pas correctement. Les médecins ont essayé de le réparer, mais elle avait une très mauvaise maladie qu’ils ne pouvaient pas guérir ».

# Est-ce-que tu vas mourir ? Est-ce-que je vais mourir ?
Votre enfant pourrait commencer à se rendre compte que les personnes qu’il aime pourraient mourir. Il peut à cette occasion exprimer la peur qu’il a de vous perdre, qu’il vous arrive quelque chose. C’est une bonne idée de faire savoir à votre enfant que la plupart des gens ne meurent que lorsqu’ils sont vieux et malades. Mais encouragez aussi votre enfant à apprécier l’instant présent plutôt que de vivre en redoutant le futur. « Pour l’instant, je suis bien en vie, et je fais tout ce qu’il faut pour que ça dure le plus longtemps. J’ai envie de faire plein de choses avec toi ». Si un proche jeune est décédé, faites savoir à votre enfant que c’est rare voire exceptionnel, que ce n’est pas ce qui se passe généralement. Vous pouvez par exemple identifier avec votre enfant d’autres personnes du même âge qui sont en bonne santé.

# Questions inattendues
Votre enfant pourrait poser des questions qui semblent un peu étranges, comme « Est-ce que papi a froid quand il est mort ? » ou « Est-ce que mamie peut me voir maintenant ? » Essayez de répondre de manière simple et concrète à ces questions car elles aident votre enfant à comprendre ce qu’est la mort.

Quand parler de la mort d’un proche à son enfant ?


Lorsqu’une personne chérie ou importante est décédée, prenez le temps de l’expliquer à votre enfant dès que possible. Si votre enfant le découvre par accident ou par quelqu’un dont il n’est pas proche, cela pourrait être difficile pour lui. Les enfants perçoivent les changements sans qu’on leur dise, et ils peuvent imaginer des choses terribles. Ne pas se sentir mis « à part » est rassurant. Selon les âges, les enfants n’ont pas le même niveau de compréhension de ce qu’est la mort. Les réactions au décès d’un proche varient en fonction de l’âge et de chaque enfant. Vous pourrez trouver des informations à ce sujet sur cette fiche.


Compréhension de la mort en fonction de l’âge


# 0-2 ans : les enfants ne comprennent pas le concept de mort. En revanche, si une personne très proche d’eux, notamment un de leurs parents décède, ils vont y réagir de la même manière qu’à une séparation ou un abandon en ayant par exemple des difficultés à se séparer de la personne qui s’occupe d’eux.

# 2-6 ans : les enfants n’ont pas encore intégré le caractère irréversible de la mort. A cet âge-là, les enfants ont une conception du Monde autocentré. Aussi, ils peuvent parfois s’attribuer la responsabilité du décès d’un proche.

# 6-11 ans : les enfants comprennent l’aspect permanent de la mort. Ils vont surtout s’interroger sur les raisons de la mort d’une personne.


Références

Auteurs

Hélène PONCET-KALIFA
Psychologue

Vincent TREBOSSEN
Psychiatre

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