Votre enfant présente une peur intense et démesurée face à certains objets ou situations précises. Il peut s’agir d’une phobie spécifique. L’objectif de cette fiche est de vous donner des pistes d’observation de votre enfant afin de repérer s’il souffre de ce trouble anxieux. Nous allons également aborder les mécanismes qui peuvent faciliter le maintien dans le temps de cette peur intense.
Qu’est-ce qu’une phobie spécifique ?
Une phobie spécifique est une peur persistante, excessive et irrationnelle d’un objet, d’un animal, d’une activité ou d’une situation. Certaines phobies sont très spécifiques et limitées (nombre de situations où l’objet peut être rencontré) comme la phobie des araignées (arachnophobie) et donc l’enfant est peu limité dans ses activités par sa phobie. D’autres phobies comme celle des pigeons peut avoir un impact plus important sur la vie de l’enfant car il est susceptible d’en rencontrer souvent lorsqu’il sort dans la rue s’il habite en ville.
5 à 15% des enfants souffrent d’une phobie spécifique, avec un âge de début le plus souvent entre 5 et 9 ans. Les filles sont deux fois plus touchées par les phobies que les garçons.
Est-ce que toutes les peurs des enfants sont des phobies spécifiques ?
Non, toutes les peurs ne sont pas des phobies. On différencie les peurs à visée adaptative et les phobies.
# La peur adaptative
Des phases de peur surviennent durant le développement normal des enfants; la peur étant une émotion inhérente à tout être humain avec pour fonction de protéger du danger et pousser à s’adapter à de nouvelles conditions. Les causes des peurs des enfants varient en fonction de leur âge, par exemple, « la crainte d’être mangé » ou la peur des grands animaux ont lieu typiquement vers 2 ans, vers 3 ans c’est plutôt la peur de petits animaux qui est majoritaire, et c’est à l’adolescence que la peur de l’avion devient fréquente. Ces peurs, que l’on appelle « développementales », évoluent favorablement avec l’âge, elles ne persistent pas dans le temps et sont sans conséquences importantes sur le fonctionnement de l’enfant.
Tant que la peur n’est ni trop intense ni trop fréquente dans des conditions de vie habituelles (en dehors de périodes particulières, par exemple de changement), elle n’est pas pathologique.
# La peur phobique
Dans le cas de la phobie spécifique, la peur n’est plus “mesurée et protectrice” comme dans la peur adaptative mais intense et disproportionnée par rapport au danger : c’est alors que des manifestations physiques qu’on peut qualifier comme surprenantes d’un point de vue rationnel sont présentes comme les sueurs, l’accélération du rythme cardiaque, des difficultés à respirer, l’agitation, et très souvent la recherche de la personne qui est source de réassurance (qu’on appelle « personne contraphobique »). L’enfant peut parfois réussir à se confronter à la situation anxiogène ou à l’objet de sa peur (appelé “objet phobogène”) mais au prix d’une détresse importante.
Pour parler de phobie spécifique, en plus du caractère irrationnel de la peur et des symptômes physiques qui l’accompagnent, il faut considérer certains autres critères comme :
- La persistance de la peur, c’est-à-dire le fait que la peur se maintienne dans le temps.
- L’ impact dans la vie de l’enfant, comme une limitation des activités qu’il aime faire habituellement par peur d’être confronté à la situation qui l’inquiète.
Il est à noter que les enfants ont généralement conscience du caractère irrationnel et disproportionné de leur peur, ce qui vient parfois renforcer un sentiment de dévalorisation d’eux-mêmes.
Une phobie spécifique peut disparaître spontanément en quelques mois, mais aussi persister plus longtemps et nécessiter un accompagnement.
Votre enfant qui présente une phobie est tenté de s’éloigner de ce qui lui fait peur, on parle alors d’évitement.
Qu’est ce qu’une conduite d’évitement ?
Lorsque votre enfant essaye d’éviter de revivre l’expérience très désagréable qu’il expérimente quand il se confronte à l’objet de sa peur, on parle de conduites d’évitement.
L’exposition progressive est expliquée dans la fiche “Mon enfant souffre d’une phobie spécifique : Comment l’accompagner ?”
Éviter ou fuir ce qui fait peur procure un certain soulagement à court terme: l’enfant est soulagé de ne plus ressentir les sensations corporelles désagréables liées à la peur ni les pensées négatives associées.
Mais l’évitement devient, à moyen et à long terme, un facteur de maintien de la peur et l’un des principaux obstacles pour atténuer la phobie: A force de fuire, l’enfant n’a pas la possibilité de se prouver à lui-même qu’il peut réussir à mieux gérer sa peur et, la croyance erronée “je ne suis pas capable” se renforce.
Prenons comme exemple la phobie des pigeons:
- Votre enfant a été confronté à un pigeon alors qu’il jouait tranquillement au parc, et il a ressenti une peur très intense. Cette peur s’est accompagnée de sensations physiques désagréables (par ex : sueurs, tremblements, sensation de manquer d’air). Des pensées et des images négatives ont émergé au même temps (« Le pigeon est dangereux, il est dégoutant, il est sale » ou « Je risque de mourir quand je suis prêt d’un pigeon ou s’il me touche »).
- Comme conséquence, il préfère dorénavant éviter les pigeons . Il a des idées dans sa tête comme: « Je ne peux plus passer à côté d’un pigeon”, “La seule façon de rester calme est de traverser la rue si je vois un pigeon”, “ Je dois être en présence de mes parents si je vais à un endroit où il y a des pigeons”, “Il est impossible pour moi d’aller dans un parc où il y a beaucoup de pigeons” … Il se confronte donc de moins en moins aux situations où il est susceptible de croiser un pigeon et limitera ainsi ses sorties et activités ludiques à cause de cela.
- Plus votre l’enfant évite de rencontrer des pigeons, plus la croyance dysfonctionnelle (« Je suis incapable de m’y rapprocher sans perdre le contrôle ») devient une réalité (car avec des évitements il ne se prouve pas qu’il pourrait être capable de se rapprocher d’un pigeon en restant calme).
Vous pouvez aider votre enfant à diminuer sa phobie en vous montrant d’abord compréhensifs envers lui, notamment en reconnaissant qu’il est vraiment en difficulté quand il manifeste ses craintes. Ensuite, vous pouvez mettre en place des stratégies concrètes qui lui permettent de s’exposer progressivement à l’objet qui est source de peur. «L’exposition dite progressive » est le moyen le plus efficace pour surmonter une phobie.