L’entrée à l’école primaire constitue un moment décisif dans la trajectoire développementale des enfants. Alors que jusqu’à présent la scolarité se déroulait dans un cadre assez souple et permissif, on demande aux enfants de rester assis à une table et de travailler. L’entrée en primaire est également le moment où on attend des enfants qu’ils entrent dans les apprentissages de la lecture, de l’écriture et du calcul, ce qui leur demande de mobiliser d’importantes ressources attentionnelles. En outre, le soir, les enfants doivent, pour la première fois, faire leurs devoirs.
Il est possible que votre enfant montre des difficultés dans ces nouvelles tâches. Il peut avoir du mal à se concentrer, se montrer impulsif en classe avec des prises de paroles intempestives et de l’agitation, perdre régulièrement ses affaires et avoir du mal à s’organiser …
Doit-on considérer qu’il s’agit d’un simple temps d’adaptation à la primaire ? Comment aider son enfant ? Doit-on se poser la question du diagnostic de TDAH ?
Est-ce normal que mon enfant ait du mal à se concentrer en classe, s’agite facilement et ne parvienne pas à rester assis sur sa chaise ?
#L’agitation motrice est un comportement fréquent à cet âge. Les enfants sont sans cesse en mouvement, et l’agitation peut parfois être excessive. Ils peuvent gesticuler, se tortiller et éprouver des difficultés à rester assis.
#L’impulsivité aussi est fréquente à cet âge. Les enfants peuvent avoir des difficultés à inhiber un comportement, une réponse, et ce, de manière excessive et non planifiée. Ils peuvent être brusques dans leur gestes, impatients, s’emporter quand ils sont contrariés. Ils peuvent aussi être en recherche de sensations et de nouveautés pour éviter les situations répétitives et ennuyeuses qui nécessitent un effort intellectuel soutenu.
#Quoi qu’il en soit, c’est l’intensité de ces comportements, leur fréquence, les mises en danger, le prolongement dans le temps des difficultés et leur retentissement sur le quotidien de votre enfant et le vôtre qui doivent vous alerter et vous inciter à demander de l’aide.
Pourquoi demander de l’aide ?
Ces comportements, quel que soit l’âge, lorsqu’ils sont sévères et durables peuvent entraîner des conséquences négatives pour l’enfant, sa scolarité, sa socialisation et sa vie familiale. Cela peut se traduire par des difficultés dans différentes sphères de la vie de votre enfant :
Au domicile | À l’école | Dans les relations sociales |
#Le manque d’organisation et le défaut de perception de temps peuvent entraver l’ensemble des activités quotidiennes. Alors qu’en grandissant, on attend des enfants qu’ils soient de plus en plus autonomes, ce manque d’autonomie, parfois attribué à une immaturité affective, peut entraîner une fatigue et une irritabilité chez vous, mais également chez la fratrie. #La réalisation des devoirs peut s’avérer coûteuse et difficile. Votre enfant peut avoir tendance à procrastiner, se montrer démotivé. Il peut nécessiter une assistance pour maintenir son attention sur la tâche. À l’inverse, il peut aussi exister une hyperfocalisation sur les tâches plus attractives avec gratifications immédiates telles que les jeux sur écrans. Votre enfant peut aussi éprouver des difficultés à jouer en silence, ce qui peut perturber le cercle familial. #Votre enfant peut également présenter des difficultés d’endormissement liées à l’hyperactivité mentale et l’agitation motrice. | #Les difficultés scolaires peuvent apparaître au premier plan à l’entrée dans la scolarité primaire du fait de l’accroissement des exigences académiques dans un cadre souvent plus normatif que celui de la maternelle #En classe, votre enfant peut être agité, instable ou a contrario peut sembler lent, passif, “dans la lune”. Il peut éprouver des difficultés à rester concentré sur un exercice long et complexe. Il peut se montrer alors peu motivé et exprime parfois une réticence à effectuer le travail. Il peut avoir tendance à bâcler la tâche pour la terminer le plus vite possible ou se précipiter pour résoudre un problème sans lire l’énoncé jusqu’au bout. #Dans une salle de classe, il existe une forte distractibilité liée aux nombreuses stimulations visuelles et auditives présentes. Les difficultés à maintenir son attention peuvent conduire votre enfant à commettre des erreurs grossières dans son travail scolaire et à ne pas identifier les pièges présents dans les exercices. #Votre enfant peut ne pas toujours écouter et/ou mémoriser les consignes données à l’oral et peut alors paraître peu autonome ou même dans l’opposition. #Votre enfant peut perdre souvent des objets nécessaires à son travail et être ainsi pénalisé dans ses résultats scolaires. | #Les répercussions peuvent également être pénalisantes sur les relations sociales du fait des difficultés de comportement (impulsivité, instabilité motrice) mais aussi des difficultés à s’engager dans la relation du fait d’une distractibilité, de la difficulté à porter une attention conjointe avec ses pairs sur une activité par exemple et d’une dysrégulation émotionnelle. #Votre enfant peut avoir des difficultés à porter attention aux émotions ou intentions de ses pairs, et se montrer autoritaire. Il peut ainsi parfois être exclu des jeux en groupes ou ne pas être invité aux anniversaires des camarades, alors qu’il possède de bonnes compétences sociales. Cette exclusion peut être vécue négativement par votre enfant et peut participer à une faible estime de soi. #Dans les conversations, votre enfant peut couper la parole, répondre avant la fin des questions, parle souvent trop et trop fort. Il peut paraître sans filtre et donner l’impression de ne pas écouter ce qu’on lui dit. #Concernant les relations au sein de la famille, votre enfant peut avoir peine à écouter et à respecter le cadre. Il peut alors se retrouver mis à l’écart des activités partagées en famille. |
Devant de telles difficultés, quels sont les éléments qui peuvent m’orienter plus spécifiquement vers un TDAH ?
Les symptômes du TDAH à savoir l’agitation motrice, l’impulsivité, l’opposition et l’inattention sont peu spécifiques dans cette tranche d’âge. C’est donc un faisceau d’arguments qui, associés, peuvent constituer un niveau de préoccupation suffisant pour vous amener à se questionner sur l’existence d’un TDAH :
#L’intensité, le retentissement et la persistance de plusieurs symptômes (agitation, impulsivité, inattention) que l’on peut retrouver.
#L’existence chez votre enfant d’autres difficultés ou troubles du développement associés : trouble du langage, trouble des coordinations motrices, trouble du spectre de l’autisme par exemple…
#Des antécédents familiaux chez les parents, ou dans la fratrie notamment de TDAH ou d’autres troubles neuro-développementaux.
#Des complications ou antécédents lors de la grossesse ou de l’accouchement : une prématurité ou un problème de croissance du fœtus par exemple.
Comment fait-on le diagnostic de TDAH chez l’enfant en primaire ?
C’est à cet âge que la demande d’une démarche diagnostique est la plus fréquente. C’est en effet à ce moment que les conséquences comportementales et sur les apprentissages deviennent les plus impactantes.
Comme pour les autres tranches d’âge, le diagnostic de TDAH est avant tout clinique. La spécificité à l’âge scolaire réside dans l’importance du recueil des informations auprès de l’école (tant comportementales que sur le plan académique) en plus de celles des familles. L’objectif est alors de déterminer l’intensité des symptômes, mais aussi leur retentissement sur les apprentissages, les relations sociales et sur le plan familial.
Il faut noter que le retentissement académique n’est pas systématique et que des enfants avec TDAH peuvent conserver de bons résultats scolaires, notamment lorsqu’ils ont un bon niveau cognitif.
Ces évaluations peuvent être appuyées par des questionnaires standardisés comme les échelles de Conners ou l’ADHD-RS. Le clinicien peut également s’appuyer sur des évaluations neuropsychologiques : test de QI (Échelles de Wechsler, WISC 5), tests attentionnelles (Tea-Ch, NEPSY II, CPT par exemple) ainsi que sur des bilans psychomoteurs et orthophoniques lorsqu’ils apparaissent nécessaires.
Quels autres troubles peuvent accompagner le TDAH à cet âge ?
L’âge scolaire est également la période durant laquelle d’autres troubles psychiatriques et développementaux peuvent se révéler et être diagnostiquées chez l’enfant. Le TDAH est associé dans plus de deux tiers des cas à un autre trouble chez les enfants et les adolescents de 6 à 17 ans. Il n’est donc pas rare de retrouver chez les enfants TDAH de cet âge un ou plusieurs des troubles suivants :
- Des troubles spécifiques des apprentissages comme un trouble du langage écrit, une dysgraphie ou une dyscalculie qui se révèlent à l’école primaire et qui aggravent les difficultés pour apprendre, mais aussi à se concentrer en classe.
- Un trouble du développement des coordinations motrices qui majore les difficultés de contrôle moteur.
- Un trouble du spectre autistique qui majore les difficultés dans les interactions sociales et la dysrégulation émotionnelle.
- Un trouble oppositionnel avec provocation : l’opposition et la provocation de ces enfants se sur-ajoutent aux problèmes de comportement liés au TDAH.
- L’anxiété et la mauvaise estime de soi peuvent également être présentes. Elles peuvent être dans certains cas la conséquence des difficultés liées au TDAH et entraîner dans les cas extrêmes d’authentiques épisodes dépressifs et des troubles anxieux.
Quelles aides solliciter (avec ou sans un diagnostic de TDAH) ?
D’une façon générale les objectifs de ces prises en charge peuvent être :
- D’augmenter les capacités attentionnelles et le contrôle inhibiteur des enfants.
- De maximiser les compétences parentales dans la gestion du comportement de leur enfant.
- De limiter les conséquences du trouble sur les apprentissages.
- De limiter les conséquences du trouble sur l’estime de soi, l’anxiété et l’humeur des enfants.
Les prises en charge non médicamenteuses | La prise en charge du retentissement scolaire | Le traitement des pathologies associées |
#Une guidance parentale telle que le programme triple P et le groupe Barkley pour la transmission d’informations et de conseils aux parents. #Une psychothérapie individuelle spécialisée en Thérapie cognitive et comportementale pour un travail sur les comportements, les relations sociales, la gestion des émotions par exemple. #Un groupe d’habiletés sociales pour le développement des compétences sociales et la gestion de l’impulsivité. #Des groupes ayant pour objet une meilleure prise de conscience de ses troubles par l’enfant et le développement de stratégie visant à améliorer la gestion de ses difficultés comme le programme PIFAM (programme d’Intervention sur les fonctions Attentionnelles et Métacognitives). #Des programmes de remédiation cognitive qui ont pour objectif d’entraîner certaines fonctions cognitives. Ces programmes peuvent se faire soit en présence d’un intervenant en cabinet soit de façon informatisée comme le programme cogmed par exemple. | #L’adaptation de la scolarité par des aménagements du cadre scolaire peuvent être proposés au sein de différents types de protocole : PPRE (Plan Personnalisé de Réussite Éducative), PAP (Plan d’Accueil Personnalisé) ou par l’intermédiaire de la MDPH avec un PPS (Plan Personnalisé de Scolarité). Ces aménagements peuvent être par exemple : être placé au premier rang et loin de potentiels distracteurs (fenêtre…), être régulièrement et avec bienveillance remobilisé sur les tâches scolaires par l’enseignant, la possibilité d’avoir plus de temps pour les évaluations, de travailler debout, d’avoir des supports écrits pour les consignes. Lorsque ces aménagements ne suffisent pas, un dossier à la MDPH permettra de demander l’intervention d’un(e) accompagnant(e) des élèves en situation de handicap (AESH). Pour plus d’informations sur les aménagements scolaires, cliquez ici ; et sur le dossier MDPH, cliquez ici. #La rééducation des troubles spécifiques des apprentissages et des acquisitions par de la rééducation orthophonique et en psychomotricité. | En cas de TDAH, avec échec des prises en charge non médicamenteuses ou d’un retentissement d’emblée des symptômes, on peut être amené à proposer un traitement médicamenteux : Par méthylphénidate : cette molécule existe en différentes formes de libération et à différents dosages. Exceptionnellement, et en seconde intention d’autres médicaments comme la clonidine ou l’atomoxétine peuvent être employés, nécessitant le plus souvent l’avis d’un médecin expert du TDAH. |