Maëlle ALLANORE (psychomotricienne), Louise BELMER psychologue, Lauriane BOUGON orthophoniste, Valérie CHAPUT psychologue, Bérengère MARAIS orthophoniste, Marie-Alix NOËL neuropsychologue, Christelle SBASNIK psychomotricienne, Valérie VANTALON pédopsychiatre, Centre d’excellence des troubles du neurodéveloppement InovAND, Hôpital Robert Debré, Paris.
1. Principes des groupes d’habiletés sociales
Les habiletés sociales sont définies comme « un ensemble de capacités qui nous permettent de percevoir et de comprendre les messages communiqués par les autres, de choisir une réponse à ces messages et de l’émettre par des moyens verbaux et non verbaux, de façon appropriée à une situation sociale » (Baghdadli et Brisot-Dubois, 2011). Elles regroupent les compétences permettant de s’ajuster à l’environnement social.
Alors que l’apprentissage des habiletés sociales se fait d’habitude de façon spontanée, naturellement dans les échanges ordinaires de la vie quotidienne, pour les personnes avec un Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA), les habiletés sociales doivent être apprises intellectuellement en passant par l’explication orale ou écrite, par l’utilisation de dessins ou schémas, et l’entraînement.
Les enfants avec TSA peuvent présenter ces altérations de la communication et des habiletés sociales :
-
- Compréhension du contexte : être capable d’imaginer ce qu’il peut se passer dans une pièce qu’on découvre (magasin, salle d’attente, salle de classe, vestiaire, etc.).
- Comprendre les intentions de l’autre et à leur attribuer des états mentaux : être capable de deviner ce que mon interlocuteur pense, va faire, va dire, ce qu’il sait, ce qu’il ne sait pas, ce qu’il croit, etc.
- Expression et de compréhension des signes non verbaux : qualité du contact visuel, reconnaissance et expression des émotions, des gestes, des postures, etc.
- Compréhension littérale, faible accès à l’implicite, au second degré, à l’humour, aux sous entendus, etc.
- Résoudre des problèmes sociaux : gestion de conflits, tissage de liens amicaux, etc. ; et à faire preuve de flexibilité : trouver plusieurs solutions à un même problème, changer de point de vue, etc.
- Compréhension des codes de la conversation : respect des tours de parole, prise en compte de l’intérêt de l’autre, réciprocité.
- S’adapter au contexte de communication malgré un bon, voire un très bon, niveau de langage formel (vocabulaire et grammaire). Exemple : un enfant qui arrive à l’hôpital, on lui demande comment il est venu, l’enfant répond “en short”.
- Compréhension des codes de la conversation : respect des tours de parole, prise en compte de l’intérêt de l’autre, réciprocité.
- Résoudre des problèmes sociaux : gestion de conflits, tissage de liens amicaux, etc. ; et à faire preuve de flexibilité : trouver plusieurs solutions à un même problème, changer de point de vue, etc.
- Compréhension littérale, faible accès à l’implicite, au second degré, à l’humour, aux sous entendus, etc.
- Expression et de compréhension des signes non verbaux : qualité du contact visuel, reconnaissance et expression des émotions, des gestes, des postures, etc.
- Comprendre les intentions de l’autre et à leur attribuer des états mentaux : être capable de deviner ce que mon interlocuteur pense, va faire, va dire, ce qu’il sait, ce qu’il ne sait pas, ce qu’il croit, etc.
- Compréhension du contexte : être capable d’imaginer ce qu’il peut se passer dans une pièce qu’on découvre (magasin, salle d’attente, salle de classe, vestiaire, etc.).
L’acquisition de ces habiletés sociales va favoriser l’autonomie, la vie sociale, les compétences académiques et l’insertion professionnelle. Elles peuvent parfois entraîner des troubles anxieux, un isolement et/ou une maladresse sociale (comportement inapproprié envers les autres enfants, agressivité non intentionnelle etc.)
Il est donc nécessaire pour ces enfants que les habiletés sociales soient expliquées et entraînées. Il s’agit de leur donner les clés de compréhension des différents codes sociaux qu’ils pourront par la suite généraliser dans leurs différents lieux de vie (à la maison, à l’école, etc.).
L’homogénéité d’un Groupe d’Habiletés Sociales (GHS) est importante pour favoriser la dynamique. Ainsi, les GHS regroupent des enfants de même tranche d’âge et ayant un niveau cognitif et de langage similaires. Le fonctionnement cognitif et langagier doit être suffisant pour permettre aux enfants de partager leurs centres d’intérêts et d’être à l’aise dans un programme dans lequel ils vont être beaucoup sollicités verbalement. Ainsi, pour chaque tranche d’âge, des thèmes différents seront abordés en fonction des problématiques du quotidien .
L’effectif est souvent de 5-6 participants. Un trop grand nombre de participants serait difficile à canaliser, en particulier compte tenu des comorbidités (hyperactivité, trouble attentionnel, trouble oppositionnel avec provocation) souvent associées au TSA. Un trop faible effectif limite la diversité des échanges et la dynamique de la situation de groupe.
Les groupes d’habiletés sociales sont animés par plusieurs professionnel.le.s différent.e.s formés à la prise en charge des TSA : orthophonistes, psychologues, psychomotricien.ne.s, éducateur.rice.s, etc. L’approche pluridisciplinaire est un réel atout : elle permet de croiser les points de vue, de proposer un travail riche et des activités adaptées. Souvent, l’enseignement théorique et les exercices pratiques sont guidés par un animateur principal. Un ou plusieurs co-animateurs sont alors chargés d’aider discrètement les enfants à respecter le cadre du groupe, à réguler leur comportement ou à coacher individuellement un enfant particulièrement en difficulté à un moment donné.
2. Fonctionnement d’un groupe d’habiletés sociales
a. Une habileté est ciblée et théorisée
Lors de chaque séance, un enseignement théorique d’une habileté sociale en particulier est choisi pour être travaillé et entraîné. Pour cela, les professionnel.le.s expliquent aux enfants pourquoi cette habileté est importante, quel est le comportement cible à adopter, les stratégies à mettre en place, en quoi elle consiste et comment faire pour l’utiliser.
Par exemple, une séance peut être consacrée au regard. Il s’agira d’exposer l’intérêt de regarder son interlocuteur, et comment moduler son regard en fonction des différentes situations sociales qui peuvent se présenter à l’enfant.
L’apprentissage des différentes habiletés sociales est graduel. Les compétences travaillées lors des séances précédentes continuent bien entendu d’être entrainées et pratiquées au fur et à mesure (en séance et au quotidien).
b. Des exercices dirigés sont proposés immédiatement
Après les explications théoriques, des activités de mise en pratique sont proposées. Ces activités recouvrent des formes variées : jeux de société, jeux de rôle, analyse ou imitation à partir de vidéos, mise en place de petites conversations, etc. Grâce à ces mises en applications immédiates, les professionnel.le.s peuvent ajuster leurs explications aux enfants, les corriger, montrer des exemples concrets et ainsi leur faire un feedback immédiat en situation.
Afin d’assurer la motivation des enfants, les intervenants s’appuient notamment sur le renforcement positif lors des séances (félicitations et encouragements, objectifs valorisés avec des contrats jetons, smileys, jeux et activités appréciés, etc).
Les activités de mise en pratique permettent aux enfants de s’entrainer ensemble, de prendre exemple sur les autres, d’apprendre entre eux et de s’amuser !
Les approches sont adaptées en fonction de l’âge des enfants :
– Chez les jeunes enfants, le jeu est le support le plus approprié. Un étayage visuel des consignes (au moyen d’images ou de pictogrammes) et la répétition verbale seront souvent associés.
– Chez les enfants d’élémentaire, les jeux de société et des situations centrées sur les intérêts des enfants sont conseillés.
– Chez les adolescents, les habiletés conversationnelles sont particulièrement travaillées ainsi que les problématiques rencontrées à cet âge (amitié, harcèlement, relations amoureuses, etc).
c. Une mise en pratique spontanée à distance
Après le groupe, il est nécessaire de continuer à s’entraîner ! En effet, pour que l’enfant développe l’habileté sociale travaillée, il est important qu’il puisse poursuivre l’entraînement dans sa vie quotidienne et varier les situations où la compétence pourra être utilisée.
Le soutien et l’implication des parents, des frères et soeurs, des grands-parents et des autres proches sont donc importants. Ils pourront créer des situations nécessitant cette nouvelle habileté, sans prévenir l’enfant, et ainsi l’aider à consolider ces compétences. De plus, des petits “exercices” peuvent être donnés à l’enfant sous forme de tâches à accomplir avant la prochaine séance. Ceci permet de continuer à développer les compétences vues en groupe, et de pouvoir faire un retour sur leurs applications.
3. Les principaux thèmes pouvant être abordés en GHS
La cohésion de groupe : connaître les règles d’un groupe (écouter les autres, formuler son avis, trouver des compromis ensemble, ne pas se moquer des autres).
La conversation : apprendre à initier, maintenir et terminer une conversation. Apprendre à respecter les règles d’une conversation (respecter les tours de parole, écouter la personne qui me parle, montrer des signes d’intérêt (ex : hocher la tête ou dire « d’accord »), faire preuve de réciprocité sociale en posant des questions, tenir compte du contexte de la conversation, rester dans le thème, etc).
Les émotions : apprendre à reconnaître et à exprimer différentes émotions positives et négatives, simples ou complexes (fierté, honte, peur, colère, etc.). Cela passe par les mimiques faciales mais aussi par les postures et l’intonation de la voix.
La communication non verbale : apprendre à reconnaître et à utiliser de façon adaptée toutes les dimensions de la communication non verbale telles que le regard, l’intonation de la voix, les mimiques, les postures, les gestes, etc.
Formuler des demandes : interpeller l’autre de façon adaptée pour faire une demande d’objet, d’aide, de renouvellement, d’informations en y associant la communication non verbale.
Le cercle des relations : adopter le bon comportement en fonction du niveau d’intimité avec une tierce personne (ce qu’on peut dire ou faire avec un parent, un professeur, un ami, un voisin, un commerçant, un étranger, etc.).
L’intensité vocale : adapter le volume de la voix en fonction du lieu et de la situation (ex : au parc, à la bibliothèque, au supermarché, dans la rue, au cinéma, quand un parent est au téléphone, en classe, etc.).
Les cadeaux : offrir ou recevoir un cadeau de façon adaptée (ex : montrer sa joie ou sa déception, remercier, avoir la bonne posture et le bon comportement au moment de donner un cadeau, etc.).
Les critiques, excuses et compliments : apprendre à en émettre ou à en recevoir et à s’ajuster à l’interlocuteur.
L’amitié : savoir qui est mon ami et se faire de nouveaux amis. Inviter mes amis à la maison ou être invité. Savoir jouer/ discuter avec eux.
Résolution de problèmes sociaux du quotidien : gérer les conflits et les désaccords, prêter et partager des jeux, gérer la jalousie et l’incompréhension, etc.).
Le harcèlement : différencier la taquinerie du harcèlement. Le reconnaître et l’éviter ainsi que les situations et personnes malveillantes.
L’humour et l’ironie : comprendre et utiliser les jeux de mots, les blagues, le second degré, les sous-entendus, etc. S’adapter à son interlocuteur.
La séduction : adapter mon comportement lorsque quelqu’un me plait et repérer les signes de réciprocité chez l’autre personne. Différencier une relation amicale et amoureuse.